Montée des tensions contre les Tutsi au Kivu

29/01/2014
29/01/2014

Le regain d’agressivité contre les Rwandophones de l’Est de la RDC dévoile la mauvaise volonté du président Kabila d’inscrire son action dans le processus de paix. Et les critiques à Kinshasa, y compris lorsqu’elles viennent de l’appareil onusien, ne semblent pas changer la situation.

The renewed aggression against Rwandophones in East-DRC reveals the unwillingness of President Kabila to implement seriously the peace process. And critics in Kinshasa, even when they come from UN, do not seem to change the situation.

29-01-2014

Les tensions demeurent vives au Nord-Kivu, où les violences visant la communauté rwandophone ne cessent pas. Ceux-ci font de plus en plus l’objet d’intimidations de la part des autorités qui agissent aux ordres de Julien Paluku Kahongya, gouverneur de la province et pièce maîtresse du dispositif de pouvoir du président Kabila à l’Est.
Les agressions se sont multipliées après le jour de l’an, et la dernière en date a impliqué des membres de la famille du général Bisengimana, un tutsi munyamulenge patron de la Police Nationale, qui ont été copieusement tabassés près de leur domicile à Goma.

Les appels à la haine fusent dans les radios locales, comme Mutaani et Kivu 1, et les bandes de motards mobilisés par la cellule gomatracienne T2 de l’Agence nationale de renseignements (ANR) sèment l’insécurité. La peur s’installe durablement et, il y a quelques jours, les policiers tutsi n’ont pas obtempéré à l’ordre de la hiérarchie de se rendre dans les villes de Kitchanga, Rutshuru et Bunia dans les cadre des opérations de distributions des cartes électorales. Bien que n’ayant pas participé à l’insurrection du M23, ils n’ont pas voulu se déplacer de la capitale provinciale par crainte de représailles.

Dans le territoire de Masisi, des chefs coutumiers font état d’un processus intensif de recrutement de paysans hutu et hunde de la part des deux groupes armés, les Nyatura et l’Alliance populaire pour un Congo libre et souverain (APCLS), qui ont en programme l’épuration ethnique des Tutsi dans la commune de Kitchanga.

Est-il possible que, presque trois mois après la cessation des hostilités avec le M23, le pouvoir n’ait pas pris aucune initiative pour l’assainissement du climat politique dans le Nord-Kivu, alors que la réconciliation nationale était l’une des clauses des accords de Nairobi signés le 12 décembre ?

Mary Robinson, l’envoyée spéciale pour les Grands Lacs de Ban Ki-Moon, le secrétaire général des Nations Unies, s’est posée la question depuis Addis-Abeba, où elle s’était rendue au siège de l’Union Africaine : « Je suis préoccupée pour la question des problèmes contre les Tutsi en ce moment. C’est l’un des engagements de la RDC de promouvoir la réconciliation. Le gouvernement et toutes les autorités nationales doivent comprendre la nécessité de changer l’environnement pour créer les conditions de la réconciliation entre les communautés appelées à vivre ensemble. Nous attendons que le président Kabila mette en place un nouveau gouvernement afin que le mécanisme de paix soit renforcé. »

On ne peut que relever à cet égard que les initiatives de Kinshasa ne vont pas dans le bon sens. Le plan de démobilisation (DDR) proposé prévoit l’éloignement des militaires du M23 de leurs communautés d’origine dans un contexte où le retour des réfugiés et la traque des FDLR (les rebelles hutu rwandais dont les officiers supérieurs comptent parmi les exécuteurs du génocide de 1994 au Rwanda) – objectifs prioritaires des protocoles de Nairobi – semblent renvoyés aux calendes grecques. Les FDLR notamment, persistent dans leurs exactions dans les territoires de Walikale et de Lubero et la Monusco n’intervient pas à protection des civils. Selon l’une de nos sources, son chef, l’allemand Martin Kobler, aurait voulu communiquer son désaccord sur le DDR au président Kabila, mais ce dernier a refusé de le recevoir.

Quant à la Brigade, qui était censée combattre tous les autres groupes armés après la fin de la guerre, les faits commencent à démontrer ce que moult soupçonnaient lors de son déploiement : la première force offensive dans l’histoire des Nations unies n’a pas été mobilisée pour éradiquer les groupes armés au Kivu, mais pour faire la guerre au seul M23 parmi eux. Car ce dernier menaçait le pouvoir du président Kabila, tout en assurant une certaine sécurité en particulier pour les Tutsi du Kivu aujourd’hui menacés.

L’Agence d’information

Mis en ligne par L’Agence d’information
 29/01/2014
 http://lagencedinformation.com/060-montee-des-tensions-contre-les.html
Sauf mention contraire, droits de reproduction et diffusion autorisés selon la licence Creative Commons Attribution BY-SA 4.0

La Nuit rwandaise 11 - Volume 1 | La Nuit rwandaise 11 - Volume 2

LE TARTUFFE OU L’IMPOSTEUR / ARCHIVES & TÉMOIGNAGES / LES FAITS SONT TÊTUS / DOCUMENTS / NEGATIONNISME ET EGLISE / RWANDA, DEMAIN / LA NUIT BURUNDAISE / LA NUIT CONGOLAISE / DOCUMENTS / DOSSIER DGR / RWANDA, ILS ECRIVENT / REMERCIEMENTS


 En savoir plus

Voir aussi

Kinshasa à l’heure du soulèvement

 Vaste réaction populaire contre le coup d’Etat constitutionnel du président Kabila A l’appel de l’opposition politique, le lundi 19 janvier, la capitale de la (...)

Vaste réaction populaire contre le coup d’Etat constitutionnel du président Kabila
A l’appel de l’opposition politique, le lundi 19 janvier, la capitale de la République démocratique du Congo a été paralysée par les manifestants qui n’ont pas reculé face aux tirs à balles réelles de la police et des militaires de la Garde Républicaine. On compte une trentaine de morts et nombreux blessés parmi la population. Des affrontements violents ont aussi eu lieu à Goma, dans le Nord-Kivu, et se poursuivent aujourd’hui, toujours à Kinshasa et dans les principales villes de l’Est.

Vast popular reaction against Kabila’s constitutionnal coup. At the call of politicial opposition, monday 19th, the capital of the Democratic républic of Congo has been paralysed by demonstrators who haven’t step back, facing real bullets shot by the police and the military men from the presidential guard. 30 deaths and many wounded have been counted among the population. Violent confrontations have also occured in Goma, North-Kivu, and are still going on today, in Kinshasa and the main towns of the east.

Mis en ligne par L’Agence d’information

 20/01/2015

RDC/Kasaï. Kananga, ville martyre

 Des crimes de guerre et contre l’humanité sont commis par les forces de sécurité engagées contre la rébellion de Kamuina Nsapu. Les tueurs profitent de (...)

Des crimes de guerre et contre l’humanité sont commis par les forces de sécurité engagées contre la rébellion de Kamuina Nsapu. Les tueurs profitent de l’impunité et également de l’aveuglement de la « communauté internationale ».

Mis en ligne par L’Agence d’information

 3/04/2017

Le prisonnier des Grands Lacs

 Si l’histoire a démontré que l’ancien président du CNDP n’était pas à l’origine des problèmes qui sévissent encore aujourd’hui à l’Est de la RDC et dans tout le pays, (...)

Si l’histoire a démontré que l’ancien président du CNDP n’était pas à l’origine des problèmes qui sévissent encore aujourd’hui à l’Est de la RDC et dans tout le pays, son élargissement – mesure à prendre dans un cadre régional et par volonté du président Kabila –, pourrait être l’initiative majeure pour consolider le processus de paix et mettre fin à une situation de non-droit.

If history has shown that the former chairman of the CNDP was not the cause of problems that still plague today in eastern DRC and throughout the country, its enlargement – action that should be taken in a regional framework and by the will of President Kabila –, could be the major initiative to consolidate the peace process and put an end to a situation of lawlessness.

Mis en ligne par L’Agence d’information

 24/01/2014