25/01/2015

Le pouvoir a été obligé de faire les premières concessions face à la contestation populaire et aux inquiétudes des chancelleries hantées par le spectre d’un embrasement incontrôlable. Mais le retrait de la disposition litigieuse de la nouvelle loi électorale qui aurait permis à Joseph Kabila de prolonger sa mandature au-delà de 2016 doit être entérinée par la signature du magistrat suprême et ne semble pas en tout cas épuiser les revendications du mouvement de masse

The regime had to do the first concessions considering the popular contestation and the fear of the diplomats haunted by the fact that the country would slide into chaos. But the deletion of contested law that would have permitted to Joseph Kabila to prolong his mandate beyond 2016 must be endorsed by the signature of the supreme magistrate and doesn’t seem to exhaust the demands of this mass mouvement.

25 / 01 / 2015

C’est aujourd’hui, en fin d’après midi, que l’Assemblée nationale a emboîté le pas au Sénat et apporté l’amendement nécessaire pour que le texte de la loi électorale voté le 17 janvier par le Parlement ne se traduise pas en une mesure anticonstitutionnelle consentant à l’actuel chef de l’Etat de rester au pouvoir à l’échéance de son deuxième et dernier mandat. Ainsi, selon la lettre définitive, la réalisation du recensement des populations ne sera plus conditionnelle du déroulement de la présidentielle de décembre 2016. Ce développement avait été annoncé hier dans l’après-midi par Aubin Minaku, président de la chambre basse.
Comment on en est arrivé là ? Il a fallu une détermination nouvelle de la part de ceux qui sont descendus dans la rue pour s’opposer à la « loi scélérate » et suivant l’appel d’un groupe d’opposants réunis autour de Vital Kamerhe, Jean-Claude Muyambo et Martin Fayulu. Et il a fallu également une utilisation disproportionnée de la force par la police et la Garde républicaine, avec 148 victimes au total, un véritable carnage, pour faire craindre à ladite ’’communauté internationale’’ le développement d’un scénario à la burkinabè qui l’aurait obligée de lâcher Kabila à son destin. Ceci n’étant pas visiblement dans leurs vœux, les ambassadeurs en poste à Kinshasa de la Belgique, de la France, des États-Unis, du Royaume Unis et de l’Union européenne sont partis rendre visite au chef de l’État en compagnie de l’incontournable Martin Kobler, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en RDC et patron de la mission de stabilisation des Nations Unies (MONUSCO).

Mis aussi au parfum que dans les officines occultes de l’appareil répressif de l’État on était en train d’organiser des groupes de contremanifestants – des membres de la Garde républicaine habillés en civil – pour s’opposer au rassemblement prévu demain, ce qui aurait certainement tourné au bain de sang, ils ont vivement conseillé au Président de faire un geste d’apaisement. La déclaration de Minaku est arrivée quelques heures après, suivie par la décision prise le lendemain par les députés.
Fin de partie ? Rien n’est moins sûr, et pour diverses raisons. Avec les ambassadeurs, selon une dépêche de l’AFP, le chef de l’Etat aurait défendu avec fermeté le texte originaire. Selon une source diplomatique, il aurait ensuite conseillé à ses interlocuteurs de laisser travailler le Parlement tout en sachant que l’iter législatif a besoin de sa signature avant l’application. Un acte formel et nécessaire dont le timing est discrétionnaire. Ce qui laisse prévoir un nouveau bras de fer et une nouvelle occasion de glissement de la date de la présidentielle.
D’autre parte, il faut considérer le lourd tribut de sang payé par les jeunes qui ont occupé les rues de Kinshasa, de Goma et de Bukavu depuis lundi 19. Et qui réclament la libération de tous ceux qui ont été arrêtés pendant les journées de lutte et la démission immédiate avec poursuites judiciaires des responsables d’une tuerie que personne ne peut plus nier. Sur la sellette se trouvent notamment le vice premier ministre et ministre de l’Intérieur, Evariste Boshab Mabudi, qui est aussi l’initiateur de la fameuse loi, le chef de la police, le général Célestin Kanyama Tshitshiku, et le général Seguin Ngoy Sangelwa, patron de la Légion nationale d’intervention. Si, pendant que nous écrivons en fin de cet après midi de dimanche 25, les membres du collectif de l’opposition politique ne se sont pas encore publiquement prononcés, Lydie Omanga, porte parole de l’UNC, le parti de Vital Kamerhe, a néanmoins lancé le twit suivant : « Le gouvernement doit s’assumer en libérant les arrêtés car le retrait de l’alinéa contesté justifie les manifestations et les actions posées ». Et toujours via twitter, d’autres opposants, y compris un représentant de la Démocratie Chrétienne, ont sollicité les Kinois à faire entendre leurs voix demain à partir des premières heures de la matinée.
D’ailleurs, personne ne peut dire de contrôler les forces sociales qui se sont mobilisées à partir du 19. Leur autonomie même par rapport à ceux qui ont appelé à descendre dans la rue est un fait acquis. Nos correspondants à Kinshasa nous font état de groupes organisés dans les quartiers populaires de Bandalungwa, Masina, Ngaba, Ndjili et autres, avec un discours politique conscient et radical, comme on peut le constater de la vidéo ici en annexe.
Cela fait peur au pouvoir, mais également à la ’’communauté internationale’’ et à l’opposition politique.
Une deuxième annexe concerne une déclaration du colonel Jean-Paul Epenge, porte parole international du M23.

Luigi Elongui pour l’Agence d’information

Mis en ligne par L’Agence d’information
 25/01/2015
 http://lagencedinformation.com/086-rdcongo-le-regime-sous-pression.html
Sauf mention contraire, droits de reproduction et diffusion autorisés selon la licence Creative Commons Attribution BY-SA 4.0

La Nuit rwandaise 11 - Volume 1 | La Nuit rwandaise 11 - Volume 2

LE TARTUFFE OU L’IMPOSTEUR / ARCHIVES & TÉMOIGNAGES / LES FAITS SONT TÊTUS / DOCUMENTS / NEGATIONNISME ET EGLISE / RWANDA, DEMAIN / LA NUIT BURUNDAISE / LA NUIT CONGOLAISE / DOCUMENTS / DOSSIER DGR / RWANDA, ILS ECRIVENT / REMERCIEMENTS


 En savoir plus

Voir aussi

Montée des tensions contre les Tutsi au Kivu

 Le regain d’agressivité contre les Rwandophones de l’Est de la RDC dévoile la mauvaise volonté du président Kabila d’inscrire son action dans le processus de (...)

Le regain d’agressivité contre les Rwandophones de l’Est de la RDC dévoile la mauvaise volonté du président Kabila d’inscrire son action dans le processus de paix. Et les critiques à Kinshasa, y compris lorsqu’elles viennent de l’appareil onusien, ne semblent pas changer la situation.

The renewed aggression against Rwandophones in East-DRC reveals the unwillingness of President Kabila to implement seriously the peace process. And critics in Kinshasa, even when they come from UN, do not seem to change the situation.

Mis en ligne par L’Agence d’information

 29/01/2014

Après Nairobi, Kinshasa reste constant dans son intolérance

 Après une nouvelle offensive des rebelles ougandais dans l’Est du pays, qui a encore une fois mis en évidence l’incapacité de se battre de la part de l’armée (...)

Après une nouvelle offensive des rebelles ougandais dans l’Est du pays, qui a encore une fois mis en évidence l’incapacité de se battre de la part de l’armée régulière des FARDC, le gouvernement congolais recourt à l’intox et accuse le M23, avec lequel il vient pourtant de signer les protocoles de Nairobi. Une mauvaise manière d’entamer le processus de paix.

After a new offensive of the Ugandan rebels in the east of the country, which once again highlighted the incapacity to fight on behalf of the regular army of the FARDC, the Congolese government resorts to disinformation and accuses M23, with which it has nevertheless just signed the protocols of Nairobi. A bad way of beginning the peace process.

Mis en ligne par L’Agence d’information

 28/12/2013

Des unités de l’armée congolaises impliquées dans le massacre de (...)

 Échafaudée par le pouvoir, la thèse de la responsabilité des rebelles ougandais de l’Alliance des forces démocratiques (ADF) dans les massacres du Grand Nord est (...)

Échafaudée par le pouvoir, la thèse de la responsabilité des rebelles ougandais de l’Alliance des forces démocratiques (ADF) dans les massacres du Grand Nord est démentie par un grand nombre de témoins, observateurs et analystes. Il s’agirait plus probablement d’une diversion, instrumentalisée par Kabila pour détourner l’attention du débat sur la réforme constitutionnelle, et permettant d’écarter les controverses sur la traque sans cesse reportée contre les FDLR. La mise à l’écart du général Mundos, considéré comme un des maîtres d’œuvre du massacre, avait été demandée par la population qui voit maintenant cette sanction comme une confirmation de l’implication de l’armée dans les atrocités.

Scaffolded by DRC’s government, the theory of Ugandan rebels of the Allied Democratic Forces (ADF)’s liability in the massacres of the Far North is contradicted by many witnesses, observers and analysts. It most likely would be a diversion, exploited by Kabila to distract the debate on constitutional reform, and to rule out the controversy on the hunt constantly postponed against the FDLR. The sidelining of General Mundos, considered as one of the prime contractors for the massacre had been requested by the people who now see it as a confirmation of army’s involvement in the atrocities.

Mis en ligne par L’Agence d’information

 2/11/2014